Août a été un mois placé sous le signe de la résonance. Les films que j’ai découverts m’ont confrontée à des histoires de pertes, de luttes, mais aussi de pardon et de résilience. Mes lectures, elles, ont apporté un contrepoint plus intime, entre tendresse, fragilité et éclats de sagesse glanés au fil des pages. Enfin, la poésie m’a permis de traduire autrement ces échos, dans la forme brève et vibrante des haïku, comme une respiration au milieu des images et des mots.
Films
Songs from the Hole (Contessa Gayles, États-Unis, 2025)

C’est sans doute la réalisation qui m’a le plus marquée ce mois-ci : un documentaire diffusé sur Netflix qui retrace la condamnation d’un adolescent de 15 ans, James Jacob, à une double peine de quarante ans d’emprisonnement pour meurtre. Trois jours après son arrestation, son frère aîné, Victor, est à son tour assassiné. Pour leurs parents, c’est une autre double peine : perdre un fils dans les bras de la mort, et l’autre dans ceux du système carcéral. Le meurtrier de Victor, Jamaal Smith, est quant à lui condamné à vingt-cinq ans de prison.
Ce que j’ai surtout retenu de ce documentaire, c’est la force et la grâce du pardon. James porte un immense poids de culpabilité pour son geste, commis alors qu’il n’était encore qu’un adolescent. Le destin veut qu’il croise en prison l’assassin de son frère. Face à lui, il se retrouve confronté à un dilemme : venger Victor au prix de sa propre liberté, ou pardonner — une attitude perçue comme une faiblesse dans la culture carcérale. Dans ses prières, James demande à Dieu pourquoi cet homme a été placé sur son chemin. Mais la réalité est que Jamaal n’est rien d’autre que son miroir : deux jeunes hommes ayant commis un crime terrible « pour rien ».
Alors qu’il prie, il dit avoir entendu ces mots : “Ain’t nobody making you do nothing” — personne ne t’oblige à faire quoi que ce soit. Il se rend à l’évidence : “If you do not forgive, you will not be forgiven”. James choisit alors de pardonner, comme il espère qu’un jour la famille qu’il a blessée pourra lui pardonner à son tour. Ce geste lui apporte une paix intérieure, comme s’il avait réussi l’épreuve que Dieu lui avait posée.
Durant ses années d’incarcération, il se tourne vers l’écriture et la musique, sous le nom d’artiste JJ’88. Son EP reflète ce cheminement, et la chanson qui m’a le plus marquée est Steel Grave.
Aussi vus
- Nothing But a Man (Michael Roemer, États-Unis, 1964)
- Chameleon Street (Wendell B. Harris Jr., États-Unis, 1989)
- Kicks (Justin Tipping, États-Unis, 2016)
- Paterson (Jim Jarmusch, États-Unis, 2016)
- Jailbreak : Love on the Run (Dan Abrams, États-Unis, 2024)
- Youn’G (Mykel Shannon Jenkins, États-Unis, 2024)
- A Love Song for Latasha (Sophia Nahli Allison, États-Unis, 2019)
- Canvas (Frank E. Abney III, États-Unis, 2020)
- L’homme abandonné (Çagri Vila Lostuvali, Turquie, 2025)
- Le Marchand (Tamta Gabrichidze, Géorgie, 2018)
Lectures
Les dix enfants que Madame Ming n’a jamais eus (Éric-Emmanuel Schmitt, 2012)
Madame Ming prétend être la mère de dix enfants dans une Chine qui applique la politique de l’enfant unique. Fabule-t-elle ? A-t-elle contourné la loi ? Aurait-elle sombré dans la folie ? Et si c’était bien vrai ? En tout cas, une chose est sûre, c’est qu’elle dresse avec beaucoup de douceur et de bienveillance les portraits de tous ses enfants, plus originaux les uns que les autres. Cette histoire n’est pas moins intrigante que réflexive, entrecoupée par la sagesse de Confucius : « Un homme heureux se contente de peu », « Appliquez-vous à garder en toute chose le juste milieu ».
Aussi lus
- La honte – Annie Ernaux
- Rien de grave – Justine Lévy
- Jupiter et Moi – Eddy L. Harris
- Black Power. L’avènement de la pop culture noire américaine – Sophie Rosemont
Poésie
Ce mois d’août, en plus des poèmes, j’ai commencé à écrire des haïku (poème japonais reposant sur la contrainte formelle de 5/7/5) dont voici un qui entre en résonnance avec le documentaire Songs from the Hole, bien que je l’aie écrit avant.
#26
Derrière les barreaux
Mon esprit refait le monde
Oui, je garde espoir

Exposition
J’ai visité pour la première fois le musée Jenisch à Vevey. J’ai eu un immense coup de cœur pour le dessin au fusain de l’artiste zurichois Uwe Wittwer. Il s’agit d’une forêt dont le noir profond, les dégradés et les reflets dans l’eau m’ont captivé. Moi qui suis plutôt une personne qui aime la couleur, ce dessin m’a étonnement très attiré.
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